Manon DILLYS / Scénariste

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Manon DILLYS

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Scénariste

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Venez découvrir le métier de scénariste avec Manon DILLYS. Un rôle majeur pour la création audiovisuelle.

L’aventure d’un film, ou d’une série TV par exemple, commence avec ceux et celles qui, avec un stylo, une feuille, un ordinateur, et leur imagination créent les histoires dont nous nous délecterons sur nos écrans.

Manon fait partie du syndicat : « la guilde des scénaristes ». Un syndicat qui a pour but d’améliorer les relations et les conditions de travail des scénaristes sur des projets audiovisuels.

Manon DILLYS scénariste pour la série TV « Julie Lescaut », « Fais pas si, fais pas ça », ou encore le film « les Reines du ring », nous partage avec sincérité et humilité son parcours, ainsi que les secrets de l’industrie.

Maëlle VABRE : En quoi consiste votre métier de scénariste ?

Manon DILLYS : Cela consiste à écrire les histoires qui vont ensuite être mises en image par le réalisateur, les équipes et les comédiens. J’écris les histoires et les dialogues.

Il y a plusieurs étapes dans un scénario. On fonctionne par étape lorsque l’on vend un projet ou que l’on nous appelle pour écrire quelque chose de précis, on démarre alors sur une idée.

La première étape du scénario est d’écrire un synopsis, qui est l’histoire résumée en 10 à 15 pages sous forme de prose, comme une petite nouvelle. Par la suite, il faudra écrire un séquencier, il s’agit du scénario tel qu’il va apparaître, séquence par séquence, mais sans les dialogues. On décrit donc ce qui se passe dans la scène, par exemple : « il entre dans la pièce, il parle à sa mère et il dit qu’il n’est pas content ». La troisième étape est de passer au scénario dialogué.

Une fois cette étape terminée, on obtient un objet écrit, qui est un outil de travail avec lequel le réalisateur va pouvoir faire le casting et tourner.

M.V : Quelles études avez-vous entreprises pour devenir scénariste ?

M.D : J’ai fait des études de lettres à la base.

Depuis petite, j’ai toujours aimé écrire. Quand j’étais adolescente, j’avais envie d’être écrivain, j’ai toujours gardé cela à l’esprit. Puis en avançant dans mes études, j’ai un petit peu oublié ces rêves d’enfant, mais j’ai quand même été assez logique, puisque j’ai entrepris des études de lettres. J’ai fait hypokhâgne, khâgne puis une licence de lettres, ainsi qu’une licence de théâtre et d’art théâtral. C’est lors de cette licence que je me suis remise à l’écriture. Je me suis souvenue qu’en fait j’adorais écrire, j’ai d’ailleurs écrit une pièce de théâtre.

J’ai eu envie de continuer à écrire puis je me suis intéressée au scénario. J’ai par conséquent effectué une maîtrise de lettres, puis un DESS (Diplôme d’Études Supérieures Spécialisées) d’écriture scénaristique, qui se trouvait à l’université de Marseille, à Aubagne. J’y ai donc fait une année d’étude.

Je m’étais renseignée auprès des écoles. J’ai tenté l’INSAS (Institut Supérieur des Arts) à Bruxelles, mais c’était compliqué. En effet, les écoles publiques comme la Fémis (École nationale supérieure des métiers de l’image et du son) sont extrêmement sélectives dans cette région, c’est donc assez difficile de s’y faire accepter. Quant aux écoles privées, elles étaient au-dessus de mes moyens. J’ai donc vraiment eu un parcours de fac.

Étant donné que je m’intéressais au scénario, j’ai commencé à parcourir le net, et j’ai trouvé toute une communauté de passionnés de scénario. J’ai rencontré des personnes qui voulaient écrire, qui écrivaient déjà un peu, et c’est comme ça que j’ai commencé. En fait, j’ai commencé avec un copain à moi qui venait d’écrire un scénario et qui m’a proposé d’écrire avec lui.

J’ai donc à la fois un parcours assez logique, très littéraire, mais je suis également arrivée à un moment où j’ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes.

Après, il y a beaucoup de scénaristes qui n’ont pas forcément fait d’école, mais qui ont un parcours de vie et deviennent scénaristes même sur le tas. J’ai par exemple une amie qui était hôtesse de l’air avant de devenir scénariste, il y a de nombreux profils assez différents.

En revanche, le CEEA (Conservatoire Européen d’Écriture Audiovisuelle) a été créé depuis, il s’agit d’une école qui forme un certain nombre de scénaristes. De même, la Fémis a suivi dans la foulée, et a créé un département télévision qui n’existait pas avant. Il y a donc un peu plus d’offres en termes d’école maintenant qu’à mon époque, ce qui est intéressant.

M.V : Vous êtes donc autodidacte sur l’écriture de scénarios en quelque sorte ?

M.D : J’ai en effet appris mon métier un peu sur le tas si je puis dire. J’ai lu des livres évidemment, car je m’intéressais au scénario, j’ai les « bibles », à l’instar de « La dramaturgie » de Yves Lavandier. J’ai lu les livres de base. Par la suite, quand j’ai véritablement commencé à écrire avec ce copain sur les scénarios et sur le premier en particulier, j’ai vraiment beaucoup appris. Ensuite, je me suis améliorée à chaque scénario. Mais oui, je suis un peu autodidacte dans ce métier.

M.V : Quel livre conseillerez-vous à un débutant ?

M.D : Le livre « La dramaturgie » d’Yves Lavandier est fantastique. Il explique les bases de la dramaturgie. C’est très clair, il y a de nombreux exemples, c’est très pédagogique et est vraiment très bien conçu.

Je conseillerais de le lire avant de passer à des théoriciens comme Robert McKee. Ils sont aussi intéressants, mais mieux adaptés pour perfectionner un petit peu l’approche. Le livre d’Yves Lavandier est vraiment très bien lorsque l’on débute.

M.V : Par quel type de scénario avez-vous commencé (courts métrages, longs métrages, etc.) ?

M.D : Quand j’ai commencé à écrire, j’ai dû écrire des courts métrages, lorsque j’étudiais à la fac. J’ai également tourné des courts métrages avec des amis, c’était donc une toute première approche.

Lorsque j’ai commencé à écrire avec cet ami qui est devenu scénariste lui aussi et qui a également une belle carrière, nous avons été embauchés sur une série télé policière qui n’existait pas encore. Il fallait donc proposer une histoire, un synopsis. Nous avons par conséquent travaillé là-dessus, et finalement la productrice nous a dit que nous avions bien travaillé, et qu’elle cherchait des gens pour travailler sur Julie Lescaut.

À l’époque il y avait encore Julie Lescaut à la télévision, c’était encore une grosse série. À ce moment j’avais 25 ans, et mon co-auteur Simon en avait 24, nous étions jeunes. Et là, la productrice nous a demandé si nous souhaitions proposer une histoire sur Julie Lescaut, une idée d’épisode, et nous avons accepté. Nous avons donc commencé à écrire, et notre premier scénario s’est retrouvé sur le petit écran.

M.V : Quels éléments vous donne-t-on avant d’écrire un scénario ? Quelle est la liberté du scénariste ? Vous impose-t-on des idées de base ?

M.D : On ne nous impose pas des situations ou des dialogues dans un premier temps, cela dépend vraiment du travail que l’on fait.

J’ai fait beaucoup de télévision, je ne parlerai donc que de cet aspect. J’ai aussi écrit des films de cinéma, mais très peu, donc je connais mieux le fonctionnement du petit écran. En télévision, on peut écrire sur une série qui existe déjà : par exemple j’ai écrit sur « Fais pas ci fais pas ça ». Dans ce cas on nous donne ce que l’on appelle la « bible » de la série, c’est le document qui résume la série. Il donne le thème, explique de quoi ça parle, décrit les personnages, donne les évolutions des personnages au travers des saisons et résume les épisodes, ainsi que tout ce qui a été fait.

Cela a été le cas pour Julie Lescaut. On nous a donné la bible, et ensuite à partir de ça, on peut proposer une histoire qui s’inscrit dans celle de la série. Après, si on travaille sur ce qu’on appelle un unitaire, c’est-à-dire un film ou une œuvre qui se suffit à elle-même et qui sera terminée au terme de 90 minutes, cela dépend. On ne peut pas dire que l’on nous impose des choses, mais après évidemment, on a un cadre qu’on connaît : c’est-à-dire, le cadre des chaînes. Évidemment on n’écrira pas de la même façon pour TF1 et pour Canal+, à titre d’exemple, parce qu’évidemment il existe malgré tout des lignes éditoriales, et on est forcément obligé de les respecter, sinon notre texte ne sera pas pris, ou à un moment il faudra que l’on refasse tout. Ce sont donc les cadres que l’on nous impose aux débuts de l’écriture.

M.V : Comment avez-vous développé votre réseau dans ce milieu ?

M.D : C’est une bonne question, parce que le scénariste est souvent quelqu’un de très solitaire par essence et ce n’est pas du tout évident de développer un réseau.

J’ai eu la chance d’avoir un agent assez vite, et il disposait de beaucoup d’auteurs, j’ai par conséquent rencontré beaucoup d’autres scénaristes par son intermédiaire. Au niveau des producteurs je dirais que c’est un peu l’expérience, on se construit son réseau au fur et à mesure des projets.

L’avantage dans notre métier est que les projets durent entre un an et deux, donc on renouvelle assez vite le réseau, puisque l’on travaille avec des tas de producteurs différents. On rencontre toujours des producteurs qui veulent nous rencontrer, c’est une question de gestion de carrière. Au stade où j’en suis, je rencontre encore pas mal de personnes, je sais avec qui j’aime travailler, etc. Mon réseau s’est donc élargi comme ça.

Après, il existe une grande part aussi intéressante qui s’est faite, parce qu’on a un syndicat anti qui s’appelle « la guilde des scénaristes » (https://www.facebook.com/Guildedesscenaristes/), et qui a été créé il y a à peu près huit ans. Il résulte de la fusion de deux organisations qui existaient déjà. Il est vrai que les scénaristes essayaient déjà de se regrouper un peu à l’époque, afin d’être moins seuls, défendre leurs conditions de travail et puis pour échanger, pour connaître des gens. Parfois, on doit engager des scénaristes lorsqu’on crée une série, on doit engager des auteurs pour écrire des épisodes, et donc on engage des amis ou des collègues. Il faut donc se connaître, connaître la façon d’écrire de l’autre. Et donc le syndicat a été très utile, je m’y suis investie plusieurs années. On organise des soirées, on invite des réalisateurs, des scénaristes, des auteurs, ou encore des comédiens. Parfois, on organise des soirées entre nous pour débattre de thèmes propres aux scénaristes.

Ça a également été un endroit dans lequel j’ai pu développer mon réseau, plutôt un réseau de scénaristes. Pour les chaines c’est la même chose, on finit par connaître tous les conseillers, à force de travailler et de les fréquenter, et le réseau se fait comme ça.

M.V : Quel est le meilleur investissement que vous ayez fait, que ce soit en termes de temps, d’argent ou de matériel ?

M.D : Très prosaïquement, je dirais qu’il s’agit de mon ordinateur portable qui ne me quitte quasiment jamais, je le trimbale partout.

Ce qui est compliqué quand on est scénariste, c’est qu’on n’a pas des horaires de bureau, on travaille, donc forcément on se donne un cadre. Si on a une idée un soir, que l’on soit chez soi ou dans le train, s’il s’agit d’une idée pour le scénario, ou qui débloque une situation alors on peut écrire. Mon ordinateur, je ne me balade jamais sans. Même quand je pars en vacances, il ne se trouve jamais bien loin.

M.V : Travaillez-vous avec un logiciel particulier ?

M.D : Oui, j’aime travailler sur Final Draft. Final Draft est un logiciel américain de scénario qui est utilisé par beaucoup de scénaristes. Il est payant et coûte un peu cher, mais il est quand même très pratique, puisqu’il contient de nombreuses fonctions et raccourcis.

Cela fait quand même quelques années que l’on me parle d’autres logiciels que je n’ai toujours pas testés, mais qui, parait-il, sont encore meilleurs. Ce qui est génial dans ces logiciels, c’est qu’on gagne beaucoup de temps à la mise en page par exemple du dialogue. On a des fonctions qui permettent de voir la structure des scénarios par carte. À titre d’exemple, il peut sortir le film avec une carte par séquences, et on peut bouger les cartes. C’est assez pratique.

M.V : Comment arrive-t-on à se différencier d’autres scénaristes en termes d’écriture ?

M.D : C’est une vaste question, je peux peut-être y répondre en donnant des exemples. Là, à titre d’exemple, je travaille sur une série portant sur la famille recomposée, qui est une « dramédie » pour TF1. C’est une adaptation d’une série suédoise qui existe sur Netflix, donc là, typiquement, on me demande de mettre ma patte sur cette histoire. De base, on a une série qui est très suédoise dans l’esprit, avec plein de choses géniales à l’intérieur, et puis en même temps des choses qui ne sont pas très françaises, et qui sonnent un peu bizarre pour nous français lorsqu’on la regarde. Lorsqu’on m’a appelée sur cette série, j’ai dit que j’étais moi-même issue d’une famille recomposée, que je m’y connaissais bien car c’était ma vie, et que j’avais par conséquent déjà des projets là-dessus, et donc l’envie de raconter des choses sur ce thème-là, des choses personnelles. Le premier document que j’ai fait s’inspirait pas mal de ma vie.

Évidemment, c’est un exemple assez particulier, mais c’est véridique sur ce genre de projets ambitieux comme celui-là. Je travaille également sur un autre projet qui traite de la prostitution des adolescentes, donc c’est vraiment un sujet passionnant et assez difficile à mettre en place. Et c’est pareil, on me demande une certaine vision de la thématique. Quand je suis arrivée sur le projet, je me suis dit que l’histoire était difficile parce qu’on parle d’une adolescente qui est vraiment une adolescente normale, qui a une famille unie, et qui va basculer dans la prostitution. Je me dis qu’avec mon parcours, ma singularité, comment j’imagine cette descente aux enfers, et il y a forcément quelque chose d’assez personnel dans la façon de gérer cette histoire.

On se distingue aussi évidemment sur la forme même. C’est vrai que les producteurs ont parfois tendance à vouloir nous catégoriser un petit peu, nous, les scénaristes, c’est-à-dire qu’ils disent « ah oui mais alors vous êtes plus fort en structure, vous vous êtes plus forte en dialogue, etc. », c’est parfois vrai… mais pas toujours !

On doit se différencier un petit peu des autres scénaristes, soit par le ton, ou par ce que l’on aime faire. J’aime le polar, mais aussi la comédie, donc je n’ai jamais voulu être mise dans une case et ça, c’est un peu difficile. Une fois que l’on est vraiment mis dans une case, par exemple : si vous allez faire un polar super, alors les producteurs ne vous appellent que pour faire du polar, même si vous avez envie de faire de la comédie et plein d’autres choses. Il y a un ton à donner. Dans la comédie, l’humour c’est très particulier. Il existe plein de formes d’humour différentes donc tout de suite il y a un ton, une patte. Quand on fait lire des textes on dit voilà ce qui me fait rire, voilà ce que j’ai envie d’écrire.

M.V : Sur quels critères acceptez ou refusez-vous un projet ?

M.D : Il est vrai que maintenant, après 20 ans de carrière, j’ai la chance de pouvoir choisir le genre et l’histoire quand on propose une idée de série par exemple. J’ai la chance de pouvoir dire si ça me plaît vraiment beaucoup, si ça m’inspire déjà, c’est donc le premier critère. Est-ce que l’histoire me parle ? Est-ce que ça résonne en moi ? Est-ce que cela m’inspire immédiatement une idée ? Est-ce que ça résonne de façon personnelle, ou non ? Est-ce que je vais aller faire de la documentation si on me propose une série ?

On peut me proposer une série sur une thématique très particulière, et je peux trouver cela passionnant, et ainsi faire plein de recherches afin d’essayer de faire quelque chose de bien. C’est le premier critère, parce que je sais que je vais y passer des mois, donc si au bout d’un mois j’en ai marre ça va juste être terrible.

Après, je regarde évidemment qui me le propose, quelle maison de production. Avec 20 ans de carrière, je connais pas mal de producteurs, donc je sais avec qui je m’entends très bien. Les relations humaines sont très importantes dans ce métier. C’est très important de bien s’entendre avec son producteur, parce qu’il est vraiment le partenaire numéro un dans le projet d’un scénario. C’est vraiment avec lui qu’on va le défendre devant une chaîne, il faut vraiment faire équipe.

Et puis évidemment je regarde qui le fait, quelle chaîne, mais ça c’est plus au niveau de la ligne éditoriale. Si on me propose un projet de comédie je sais que Canal+ ne va pas rechercher la même chose que TF1, donc je sais déjà jusqu’où je peux aller avec l’écriture.

Il y a des projets de développement pur. Par exemple, si j’ai une idée de série sur des extraterrestres qui débarquent sur terre, et que j’ai envie la développer je vais déjà écrire toute seule dans mon coin puis je vais chercher un producteur qui va peut-être se retrouver intéressé. Je vais peut-être en voir plusieurs, ou un seul, ça va prendre beaucoup de temps. Ce sont des projets passionnants parce que ce sont des projets personnels, mais ça prend du temps et pendant tout ce temps, en général, je ne suis pas payée, c’est donc une partie des projets.

J’ai également des projets qui peuvent être mis en place plus rapidement. À titre d’exemple, TF1 a envie de développer une série sur une institutrice. Là je sais que ça va aller plus vite quand même. Le temps de développement d’écriture va être beaucoup moins long, donc je peux avoir plusieurs projets en même temps. J’ai des collègues qui travaillent par exemple sur des séries comme « Plus belle la vie », ils savent qu’ils ont trois jours dans la semaine où ils vont travailler sur cette série, c’est très encadré, donc il y a moins de marge de créativité. Par contre, ils gagnent leur vie, et à côté de ça ils peuvent prendre plus de risques sur des projets qui sont plus originaux.

Cela fait aussi partie du choix des projets. Il y a vraiment plusieurs critères, des critères à la fois artistiques, des critères vraiment pratiques (avec qui je vais travailler), et puis des critères un petit peu prosaïques (quand est-ce que ça va me rapporter de l’argent ?).

M.V : Comment gérez-vous le fait de travailler sur deux histoires en même temps ?

M.D : Alors ça, c’est un peu tout le travail du scénariste, ce jonglage perpétuel. On a parfois une charge mentale incroyable si on a trop d’histoires en tête. Quand je compare avec les copains, on a toujours en moyenne deux à trois projets en général. Le problème de ce métier c’est que c’est un métier très précaire, c’est-à-dire que les projets peuvent s’arrêter du jour au lendemain. Cela arrive vraiment même sur des projets qui sont déjà assez avancés, conventionnés avec une chaîne, sur lesquels on a été payé, et puis d’un coup la chaîne se dit « maintenant ça ne nous plaît plus, on arrête ». Donc là, on se retrouve au chômage technique du jour au lendemain. De ce fait si on n’a pas un autre projet à côté, c’est compliqué.

En termes d’organisation par exemple, je n’arrive pas à travailler sur deux projets dans la même journée. Il faut donc que je me dise que tel jour je vais travailler sur tel projet puis le lendemain sur tel projet, parce que pendant la journée je suis concentrée sur ce projet-là. En même temps le lendemain ça me fait du bien de passer à une autre histoire, donc je jongle comme ça et c’est plutôt bien. Néanmoins, le problème est qu’on a souvent trop de projets en même temps ou alors soit on n’en a pas assez soit on en a trop, mais c’est rarement équilibré.

M.V : Quels sont les nouveaux comportements, ou les nouvelles habitudes qui ont amélioré votre façon de travailler au cours des dix dernières années ?

M.D : Il y a eu un important travail de notre syndicat (la guilde des scénaristes) pour fluidifier les relations avec les producteurs et même avec les chaînes. Les producteurs et les scénaristes se sont améliorés grâce à des choses simples, par exemple en faisant une fiche généalogique d’œuvres. Comme ça, si un auteur qui a commencé à travailler sur un projet quitte le projet encours de route, alors l’auteur qui arrive derrière lui et qui reprend le projet sait qu’il y a une fiche généalogique sur laquelle il peut s’appuyer.

Globalement, les relations avec les producteurs et les chaînes sont meilleures. L’arrivée de Netflix a chamboulé beaucoup de choses. Moi, je n’ai pas encore vraiment travaillé pour les plateformes. J’ai des collègues qui l’ont fait, mais je ne sais pas si ça change encore vraiment les conditions de travail des scénaristes.

Évidemment, on n’est pas traités de la même façon, et on n’a pas la même approche des projets quand on est scénariste débutant ou quand on commence à voir une petite carrière. Avec le temps, les gens savent ce que vous avez fait, donc il y a une confiance qui s’instaure et c’est beaucoup plus agréable de travailler.

M.V : Quel est votre échec favori ?

M.D : Des échecs en scénario on en a tous. Les échecs du scénariste, c’est de ne pas réussir à mener un projet jusqu’au bout, ne pas réussir à pérenniser une série, etc.

Mais mon échec favori, c’est un échec de tous les jours, celui que j’ai fait aujourd’hui. Je me suis pris la tête toute la journée sur un scénario en me disant « là ça ne va pas, ce n’est pas cohérent, là pourquoi ça ne marche pas, je suis coincée, il va falloir que j’y passe trois jours, je vais devoir faire fumer les neurones », et ça, c’est mon échec favori parce que lorsqu’on résout l’échec, lorsqu’on trouve le truc pour que ça fonctionne on est tellement content. Et puis quand on envoie son texte et qu’on se dit « ça y est ça marche », c’est super.

L’écriture, c’est aussi l’effort. Ce n’est pas rose tous les jours. Parfois, on se demande comment s’en sortir, et quand on arrive à surmonter les difficultés, c’est génial.

M.V : Pour vous, que font les professionnels différemment des débutants dans l’écriture de scénario ?

M.D : Au niveau de la structure de l’histoire en général un professionnel qui a un peu de carrière va être beaucoup plus rapide à trouver la bonne structure ou va éviter les erreurs dans lesquelles on peut parfois tomber, il va les repérer plus vite.

Il y a donc vraiment une histoire de temps et de lucidité par rapport à l’histoire même, ou par rapport aux personnages. Et puis, par rapport aux lignes éditoriales des chaînes, quand on a un peu de carrière, on sait parler TF1 on sait parler France 2, alors c’est se censurer à l’avance mais on se dit « ça, je peux tenter, ça risque de leur plaire, celle-là non ce n’est pas la peine car ça ne va pas leur plaire ». Il y a donc une connaissance des milieux éditoriaux des chaînes, même si évidemment elles bougent avec le temps et avec les époques, ce qui est tout à fait normal.

On est également beaucoup plus rapides, donc en général, on gagne aussi du temps. Je pense que ce n’est pas une question de professionnalisme de débutant, c’est surtout une question d’ego. Quand on est scénariste de télévision, c’est un métier dans lequel il ne faut pas avoir trop d’ego. J’aime bien dire que l’on est des artisans, on n’est pas vraiment des artistes, car on n’est pas totalement libre d’écrire ce que l’on veut. Nous sommes des artisans, car à l’intérieur d’un cadre on va faire le mieux possible, et le plus créatif possible.

En même temps, il faut savoir écouter son producteur quand il dit qu’une idée ne fonctionne pas ou qu’il y a peut-être une meilleure idée à trouver. Il ne faut pas le prendre pour soi, il faut toujours être assez humble pour se dire « j’étais contente hier, mais ce matin je me relis et je ne trouve pas ça top ». Peut-être que le débutant s’accrochera plus à ses projets. Il y a une forme d’humilité à avoir mais c’est peut-être aussi une question de caractère.

M.V : Quel conseil donneriez-vous à une personne en train de travailler sur sa carrière ?

M.D : Je dirais : aie confiance en toi. Pour moi, c’est ce qui est difficile quand on est scénariste, c’est d’avoir à la fois la confiance en soi pour proposer ses idées, pour les défendre, et puis pour avoir un univers, et en même temps avoir l’humilité de savoir douter de soi au bon sens du terme : c’est-à-dire se remettre en cause, remettre des idées en question, c’est aussi très important.

Je dirais « cherche le chemin au milieu, petit scarabée mais ne désespère pas. N’aie pas trop de moments de désespoir, et n’aie pas trop moments d’euphorie non plus, parce que c’est bien de rester dans une forme d’humilité, c’est vraiment le Ying et le Yang, il faut arriver à être au milieu, mais ce n’est pas facile. »

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